REPERES
La militante du jazz
Le jazz a longtemps été le parent pauvre de la musique. En ce sens, Dee Dee est un peu une militante. Artiste populaire, elle a la chance de travailler avec un budget " variétés " et de pouvoir faire un travail de qualité. Trop souvent, dans le jazz, on va vite, on bâcle parfois, parce qu'il n'y a pas d'argent. Dee Dee Bridgewater a des idées pour faire changer les choses. Elle pense proposer à sa maison de disques ses services en tant qu'agent de liaison d'artistes pour négocier au plus près de la qualité. Elle soutient ses musiciens français et les impose quand elle part en tournée aux Etats-Unis. André Ceccarelli, son batteur depuis dix ans, et Thierry Eliez son claviste, témoignent.
Artiste et entrepreneur
En fait, ce poids administratif qu'elle a choisi et qu'elle assume, c'est pour être plus forte face à un producteur de spectacles ou une maison de disques. Plus forte pour mieux défendre son idéal artistique. Dee Dee règle les détails de ses tournées et, dans sa voiture, lit les fax ou répond au téléphone, en s'attachant aux moindres détails.
Ella Fitzgerald en ligne de mire
Elle défend un projet qui lui tient à coeur auprès de sa maison de disques Polygram (Universal musique) : Un vaste hommage à Ella Fitzgerald. Daniel Richard, le directeur de Verve, l'écoute et, sous le charme, accepte.
Une séance d¹enregistrement
Elle a accepté l'enregistrement d'un titre pour Virgin dans une compilation " Jazz à Saint Germain " dont elle n'est pas productrice. Elle en sort insatisfaite, mécontente d'elle-même. Mais elle estime avoir été honnête et avoir donné le maximum dans les limites d'un faible budget. Cette séance d'enregistrement nous permet également d'appréhender la manière dont elle travaille. Sans partition, car elle ne lit pas la musique, en laissant les musiciens chercher leurs accords et leur couleur avant d'improviser brillamment à partir de ce canevas.
Les obligations des promotions de disques
La popularité de Dee Dee est un atout dans sa négociation avec sa maison de disques, mais c'est parfois aussi une arme à double tranchant. Elle est obligée de se prêter à une douloureuse séance de promotion pour une compilation en hommage à Duke Ellington dans laquelle elle n'a chanté qu'un titre. Elle assume tout cela comme une grande professionnelle. Mieux : avec le sourire et une bonne humeur rayonnante. Deux jours plus tard, elle confie que c'était vraiment l'horreur pour elle.
Le passage de témoin entre les générations
Cette recherche de l'indépendance est aussi liée à l'histoire personnelle de Dee Dee Bridgewater. Dans sa jeunesse américaine, Dee Dee a dû beaucoup se battre pour exister en tant qu'artiste face à un père, célèbre musicien de jazz, qui ne croyait pas en elle, surtout, pense-t-elle, parce qu'elle était une fille et qu'il aurait préféré un garçon. Elle se trouve maintenant en position d'accompagner le développement de sa propre fille China qui entame à son tour une carrière de chanteuse de hip hop. A l'occasion d¹une répétition, elle vient soutenir sa fille, avec tact, en lui laissant toujours les décisions. Cette confrontation des expériences des deux générations fonctionne dans les deux sens. Dee Dee est frappée par l'exemple des jeunes musiciens de rap ou de techno, qui se produisent eux-mêmes et qui décident de tout. La nouvelle génération n'a pas à affronter les mêmes obstacles, et d'emblée, n'imagine pas d'autre voie que celle de l'indépendance.
La nouvelle donne
Au fil de sa carrière, elle a eu pas mal de déboires avec des producteurs indélicats ou des managers carrément escrocs. Cette indépendance, elle l'a gagnée, plus question de la lâcher. Maintenant, elle a aussi envie de produire certains artistes en qui elle croit et qui ne vendent pas assez pour faire vraiment ce qu'ils ont envie de faire. Dee Dee a franchi une étape dans son indépendance. " Désormais, nous dit-elle, je suis capable de "dire non avec un grand sourire ". Elle est maintenant prête à retrouver son pays, les Usa, d'où doit partir toute véritable conquête du monde musical selon elle.
Les personnages :
Jean-Marie Durand mari de Dee Dee Bridgewater. Il est aussi son manager et le gestionnaire des plannings. Il est le négociateur pour la famille.
" Dédé ", André Ceccarelli, Batteur. Il est là depuis les débuts de Dee Dee en France. Sa carrière l¹a mené des Chats Sauvages, groupe yéyé des années soixante à Nice, à sa propre formation de jazz. Son père était batteur, son frère est batteur et son fils aussi. C¹est l¹un des musiciens de jazz français reconnus internationalement.
Thierry Eliez, pianiste et claviste. Improvisateur remarquable, il accompagne Dee Dee depuis 7 ans.
China, fille de Dee Dee. Chanteuse de hip hop, elle vit en France.
Les lieux de tournage :
Le film a été tourné à Poitiers, Saint Germain en Laye, Paris , Cahors.